La République Démocratique du Congo, qui détient environ 9 % des réserves mondiales de diamants, est confrontée à une crise profonde dans son secteur diamantifère. C’est ce que révèle un rapport détaillé de l’International Peace Information Service (IPIS), un institut de recherche indépendant axé sur la paix et le développement durable, dont MINES.CD a eu connaissance le vendredi 23 mai dernier.
Le rapport d’IPIS dresse un tableau alarmant de l’industrie diamantifère congolaise, pointant ses nombreux défis et évaluant les efforts actuels comme « insuffisants » pour redynamiser le secteur et en faire un levier de développement local.
La production annuelle de diamants en RDC a drastiquement chuté, passant d’environ 30 millions de carats au début des années 2000 à une moyenne de 11,7 millions de carats depuis 2019. Ce déclin est principalement dû à la chute de la Société Minière de Bakwanga (MIBA) depuis 2008 et à la baisse de la production artisanale à partir de 2017, une baisse partiellement compensée par l’entrée en scène de la Société Anhui-Congo d’Investissement Minier (SACIM) en 2016.
L’exploitation est par ailleurs extrêmement concentrée, avec 96 % de la production provenant du Kasaï-Oriental, notamment de la région de Mbuji-Mayi, majoritairement des diamants industriels. D’autres provinces comme la Tshopo, le Kasaï-Central et le Kasaï se distinguent par une plus forte proportion de gemmes.
Le rapport souligne la faiblesse de la gouvernance du secteur, avec des services de l’État manquant de moyens pour contrôler efficacement les flux. Cela conduit à une économie largement informelle, gangrenée par la fraude et la contrebande, alimentant une méfiance persistante entre les exploitants artisanaux et les agents publics, souvent accusés d’extorsion et de fiscalité arbitraire.
Les populations locales déplorent l’absence de retombées positives. Le rapport d’IPIS, citant des données de l’ITIE-RDC pour 2022, met en évidence un écart de 12,1 millions de dollars entre les cotisations fiscales déclarées par la SACIM (18,4 millions) et les chiffres du gouvernement (6,3 millions). La redistribution aux autorités provinciales est également opaque, avec des soupçons de détournement qui empêchent un impact réel sur le développement local.
Malgré l’adhésion de la RDC au Processus de Kimberley, des doutes subsistent quant à l’efficacité du système de certification en raison des difficultés de traçabilité des diamants, de leur dissimulation aisée et des soupçons de contrebande transfrontalière.
La MIBA, jadis pilier économique du Kasaï, est aujourd’hui en ruine, minée par des « contrats léonins », un sous-investissement chronique et des accusations de mauvaise gestion. Son manque d’équipements l’empêche d’exploiter ses vastes concessions.
La SACIM, bien qu’affichant une production stable, est la cible de critiques vives. La société civile l’accuse de violations des droits des travailleurs, de violences envers les creuseurs artisanaux, de pollution, de fraude fiscale et d’un engagement insuffisant dans le développement communautaire. Le dialogue entre l’entreprise et les parties prenantes locales est quasi inexistant.
Le sous-secteur artisanal traverse sa crise la plus grave depuis les années 1980, avec une production divisée par deux en dix ans. Cette situation est due à l’épuisement des gisements accessibles, à la précarité des conditions de travail, à la faible traçabilité et à la recrudescence du banditisme. De nombreux creuseurs opèrent illégalement sur les concessions de la MIBA, au péril de leur vie, subissant souvent des répressions violentes.
Le rapport suggère que les autorités sont plus enclines à taxer qu’à accompagner les mineurs vers des pratiques plus sûres. Il préconise la création de Zones d’Exploitation Artisanale (ZEA), un soutien accru aux coopératives, une meilleure reconnaissance des autorités coutumières et la répression des abus.
Contrairement à d’autres filières minières (cuivre, cobalt, minerais de conflit) qui bénéficient d’initiatives de transparence et de respect des droits humains, le secteur du diamant reste largement en marge. Bien que des actions isolées existent (projet OrigemA, travail de la DDI, formations via l’AWDC), elles sont jugées insuffisantes.
L’IPIS conclut que, sans un accompagnement financier et technique renforcé, il est « irréaliste » d’attendre de la RDC une conformité totale aux exigences internationales en matière de droits humains, de normes ESG et de certification. Le rapport appelle à une réforme globale et inclusive pour que le diamant devienne un véritable moteur de développement, et non un facteur de marginalisation.
Avec mines.cd

RDC : Un rapport d’IPIS met en lumière la crise du secteur diamantifère et préconise des réformes urgentes
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